De plus en plus d’études sont publiées sur la vie numérique des enfants. La Digital Parenting Foundation a recensé et analysé une soixantaine d’enquêtes, baromètres, rapports statistiques et études, sur une dizaine d’années, qui portent sur le sujet de la mesure et de la compréhension des usages des enfants sur les outils numériques. Ce nouveau rapport “Enfance & Numérique – Comment mesurer les pratiques digitales des enfants en France ?” révèle la grande hétérogénéité de ces études. La confusion provient du manque de transparence sur les méthodologies d’enquêtes et sur leurs objectifs selon que le commanditaire a une mission régalienne, académique ou industrielle et économique.

Des recommandations pour une approche concertée et robuste

La vie numérique d’un enfant est complexe et l’étude de ses pratiques digitales l’est tout autant. La Digital Parenting Foundation émet des recommandations destinées aux parties prenantes. Elle met en avant la nécessité de conduire les études avec une gouvernance multipartite, de garantir la transparence sur l’intention de recherche et sur la méthodologie employée, de centrer ces études sur le sujet des usages numériques des enfants ou, dans le cas des études de cohortes* dont le thème central est par exemple le développement de l’enfant, d’intégrer un volet plus conséquent sur les usages numériques. Elle signale l’intérêt de la complémentarité des études quantitatives et qualitatives, sous de nombreux aspects, ainsi que de mesurer les risques mais aussi les opportunités de l’ère du digital. Elle incite à prendre en compte ce que racontent les enfants, c’est-à-dire de les interviewer selon des moyens d’enquêtes appropriés. Enfin, elle recommande un engagement politique durable afin de limiter les effets liés à l’émiettement des initiatives.

Une grille de lecture pour comprendre les études existantes

L’analyse de la Digital Parenting Foundation, qui a abouti à ce rapport, vise à proposer des clefs de lecture pour comprendre la logique des études existantes. Elle repose sur le recensement des études disponibles et en accès libre, qui mesurent les usages numériques des enfants. Les études ont été classées selon trois dimensions :

• la temporalité (dates, fréquences, récurrences)
• la nature des commanditaires (monde régalien, industriel, recherche, ONG,…)
• la méthodologie. La méthodologie a été étudiée sous l’angle de cinq critères : la population étudiée, le sujet principal (équipement des foyers, santé de l’enfant alimentation, parentalité, usages online, usage des réseaux sociaux…), la taille de l’échantillon, la personne interviewée (parent ou enfant ou les deux), et enfin la méthode de collecte des données.

Les méthodologies développées en France ont ensuite été comparées avec celles élaborées au sein des programmes européens “EU Kids On Line” et “Global Kids On Line”. La Digital Parenting Foundation a donc cartographié les études existantes en France. La matrice obtenue est incomplète car les méthodologies ne sont pas toutes accessibles, parfois dévoilées mais en partie seulement, ce qui contraste avec les méthodologies libres d’accès type “EU Kids Online”. La multiplicité et la dispersion des initiatives dont l’objectif est de mesurer les pratiques digitales des enfants posent alors question. La grille de lecture proposée permet de comprendre la nécessité d’apporter de la clarté et incite donc à une approche concertée, scientifique et indépendante du sujet.

Pour aller plus loin

Pour aller plus loin, la Digital Parenting Foundation propose de rendre permanent et accessible ce recensement des études, grâce à une veille active en lien avec la communauté scientifique, et à l’élaboration d’un moteur de recherche permettant à tous d’accéder de façon structurée à cette information. Elle soumet également l’idée d’aider au rassemblement de toutes les parties prenantes sur ce sujet de l’enfance dans l’espace digital.

“Les enfants d’aujourd’hui seront la société de demain, c’est donc aujourd’hui que nous devons tous ensemble réfléchir aux démarches à mettre en place pour les aider, eux et leurs familles, à tirer le meilleur profit du numérique tout en en évitant les pièges. Nous pensons que seule une approche indépendante et neutre, rassemblant toutes les parties prenantes, fondée sur une démarche scientifique, comme une approche de type «Grenelle de la Parentalité Numérique» serait à la hauteur des enjeux. Elle permettrait de comprendre tout ce qui se joue au travers de la vie numérique des enfants, et de prendre les décisions de long terme nécessaires en la matière, à travers un ensemble de rencontres entre les mondes politique, associatif, de l’éducation et de la santé et les entreprises, ainsi qu’à mettre en place des outils d’accompagnement adaptés. Et nous sommes prêts à œuvrer à son avènement, puis à y prendre toute notre part” expliquent Marie Mayoud et Eric Leroy, les fondateurs de l’initiative Digital Parenting Foundation.

*Une cohorte est un groupe de personnes engagées dans une étude épidémiologique.